vendredi 27 août 2010

L'art au service de la Parole

Vue de la chapelle Sixtine
Alors que nous terminons notre dernière journée entière à Rome, et notre dernière journée officielle de l'été avant de nous rafraîchir sous les 15 degrés de Berlin, c'est 2 pèlerinages entrepris au cours des 3 derniers jours que nous complétons aussi : pèlerinage dans la Rome antique et pèlerinage artistico-religieux au royaume de l'Église catholique, le Vatican. Point culminant de ces 3 jours d'intenses découvertes, une œuvre majeure, la chapelle Sixtine, qu'on découvre au milieu de la visite des Musées du Vatican.

Le lancement et la conclusion d'une carrière

C'est au son des "No foto" et des "Please stand up" insistants des gardiens italiens et de leur "shhhiiii" lancés avec la régularité d'un métronome pour maintenir le caractère sacré de ce lieu de tourisme que nous sommes entrés dans la chapelle qui a accueilli les premières et dernières œuvres d'un grand peintre, Michel-Ange. Lui se définissait pourtant d'abord comme un sculpteur!

Œuvres de jeunesse sous la forme des peintures de la fresque de la chapelle:

  • récit de la Genèse, donc de la Création de l'homme et de la perpétuation du péché originel d'Adam et d'Ève jusqu'au déluge vécu par Noé en punition
  • images des grands prophètes de la foi catholique et de Sibylles païennes, prophétesses dans la mythologie grecque. 
Choisi par le "rebelle" pape Jules II alors qu'il n'avait jamais peint avant d'imaginer ces fresques, Michel-Ange, à la fois artiste surdoué et féru d'histoire biblique, y peint des tableaux qui semblent s'élancer hors de la voûte tellement ils paraissent animés.

Lutter contre le protestantisme

Au soir de sa vie, l'artiste toscan signe à 72 ans le Jugement dernier, gigantesque toile sur pierre s'élevant au-dessus de l'autel de la chapelle sacrée, du haut de laquelle le Christ contemple les élus s'élevant vers le ciel guidés par les anges et les damnés embarquant sur le fleuve les menant à l'enfer. Chef d'œuvre esthétique, la fresque servait d'avertissement en ces temps de maraudage de la religion protestante et de l'offensive inquisitrice de l'Église: éloignez-vous de la foi et vous brûlerez éternellement dans les flammes de l'Enfer!

Anecdotes:
  • dans ce récit de fin du monde, Michel-Ange n'a pu résister à se mettre en scène, sous les traits d'un apôtre du Christ, Saint-Barthélemy, tenant entre ses mains une étrange et flasque peau humaine
  • les parties intimes des corps nus et souvent viriles de ce Jugement furent pudiquement recouverts dans les années suivant son dévoilement par un élève de Michel Ange sous les ordres du pape Pie IV.
Un livre d'histoire aux couleurs qui explosent

L'art au service de la Parole.

Telle est la chapelle Sixtine, livre d'histoire plein de vie aux teintes de jaune, de rouge, d'orangé, de vert, de bleu, de brun, nuances de beige et de rose, qui, fraîchement restaurées de 1990 à 1994, explosent en racontant "l'histoire de l'humanité", entendre ici l'histoire du peuple élu. De la création de la lumière aux tableaux comparant la vie de Moïse, sauveur du peuple juif tenu en esclavage en Égypte, à celle de Jésus, aux images des papes qui ont succédé à Saint-Pierre et aux ancêtres du Christ, c'est une série de tableaux ayant pour sujet le corps de l'Homme, source de péché mais aussi d'espérance, qu'ont peint les artistes ayant travaillé à la décoration de la capella.

Si les sujets éblouissent, la technique employée pour réaliser les fresques a de quoi surprendre: utilisée aussi par le peintre Raphaël, elle consiste à peindre directement sur l'enduit fraîchement utilisé pour couvrir  les murs, d'où le mot "fresco". La peinture sèche en même temps que l'enduit et devient partie prenante du mur à recouvrir.

Aujourd'hui, la chapelle, visitée certes par des milliers de touristes, constitue également un haut lieu de la vie politique vaticanaise, puisque c'est en ses murs feutrés que sont élus les papes lors des conclaves rassemblant les cardinaux à Rome. Marc Ouellet y sera-t-il un jour élevé au rang de Souverain pontife? Dieu nous en garde. J'aurais d'ailleurs dû allumer un lampion à cet effet sous la coupole bienfaitrice de la basilique Saint-Pierre...

Trésors de l'humanité

La chapelle Sixtine ne constitue qu'un des nombreux trésors de l'humanité qu'abritent les Musées du Vatican, enfilade de salles et de galeries dans lesquelles on pourrait déambuler une semaine durant, surprenamment contemporains dans leur pavillon d'accueil. Guidé par un personnel efficace, nous y entrons rapidement, nous équipons d'un audioguide en français, avons accès facilement aux toilettes, boutiques et restaurants. Nous peinons seulement, au terme d'une visite de près de 4 heures, à en trouver la sortie!

Dès le début de la visite, je suis soufflé par les pièces du Museo Gregoriano  Egizio, consacré aux pièces rapportées d'Égypte sous l'empire romain. Nous y admirons des hiéroglyphes remontant à 2600 avant Jésus-Christ, des sarcophages de marbre et de bois dont les couleurs sont admirablement conservées ainsi qu'une foule de menus objets et statuettes provenant du pays de Cléopâtre. À côté de ces pièces, l'exposition Fascinantes momies égyptiennes du Musée de la civilisation de Québec doit paraître d'un pâle intérêt! Si les centaines de statues de marbres de l'Antiquité romaine du Museo Pio-Clemento, elles aussi en parfait état ou presque me semblent aussi spectaculaires, cette plongée au coeur de la civilisation égyptienne obsédée par le culte des morts m'a vraiment ravi. Quoique les sculptures romaines de la Salle des animaux possèdent aussi leur charme, parfois ludique!

Éblouis par la richesse des pièces des premiers musées, nous accélérons le rythme de notre visite en nous basant sur les recommandations de notre cher Lonely Planet, traversant de toute façon tous les musées et y jetant un oeil au moins attentif. Encore des statues de divinités antiques dans le Museo Chiaramonti, sculptures, candélabres de marbre et tapisseries dans les Galleria dei Candelabri et degli Arazzi, et les superbes et immenses cartes géographiques -40 en fait- aux couleurs vives de la Galleria delle Carte Geografiche, représentant les différentes régions de l'Italie de l'époque (1580 à 1583), cartes "régionales" coiffées par 2 tout aussi imposantes de l'Italie antique et de celle de la Renaissance. Le plafond de cette galerie, couvert de fresques évoquant la vie des Saints et l'histoire de l'Église, est presque aussi beau.

J'avoue en fait avoir davantage porté d'attention à cette magnifique galerie qu'aux pourtant célèbres chambres du peintre Raphaël, décorées par lui ou sur sa supervision, pourtant oeuvres majeures des musées vaticanais.  Richement ornées, elles servaient d'appartements aux papes, dont Jules II, encore lui, qui décidément, faisait confiance à la jeunesse puisque c'est à un jeune Raphaël de 25 ans qu'il en confia la décoration!

À la suite de notre visite de la chapelle Sixtine, la beauté nous attendait encore dans une série d'autres musées, dont la Pinacoteca et ses 460 toiles, et parmi elles quelques chef-d'oeuvres de Raphaël, et dans une série de salles consacrée à l'art contemporain religieux, inaugurée par le pape Paul VI -celui qui interdit la pilule contraceptive dans les années 1960- pour notamment réconcilier les artistes avec l'Église, artistes que celle-ci avait brimé dans leur créativité pour en canaliser le talent à des fins de propagande.

Que retenir de cette visite des Musées du Vatican?

Que la richesse de l'Église fait honte? Qu'elle n'aurait pas dû "s'emparer" de tous ces trésors et devrait plutôt les retourner à certains pays, dont l'Égypte? J'y vois plutôt une chance inouïe que l'Église catholique et ses papes aient constitué ces musées et rendent toutes ces pièces accessibles au public -on peut presque y toucher, je me demande sincèrement comment toutes ces œuvres sont conservées dans un musée dont les fenêtres sont parfois ouvertes, les pièces ensoleillées et la température peu contrôlée. Pour aussi peu que 13 euros, on accède à de véritables trésors, par lequel on appréhende des civilisations entières.

Si j'étais sur Facebook, je dirais "J'aime"!

lundi 23 août 2010

Rome: quand la ville nous appartient!

Fontaine de Trevi
Rome au mois d'août deviendrait le domaine de touristes un peu hagards fuyant le soleil et la chaleur pour s'agglutiner dans les zones d'ombre. Portrait non sans vérité de la capitale italienne que trace notre fidèle compagnon de voyage, notre cher guide Lonely Planet.

Un peu assommés par la chaleur sèche de 36-37°C à notre arrivée samedi, chaleur qui se maintient, délaissant nous aussi le soleil à compter de 10h pour privilégier l'ombre lorsque possible, nous nous sommes dits que nous aurions pu terminer notre périple européen par Rome pour profiter de ses belles journées de septembre et l'amorcer à Londres tandis qu'il y fait moins frais. Tous les Romains semblent avoir fui leur ville et, si celle-ci révèle sa beauté, la capitale de Berlusconi semble peu habitée. Quelques bonnes adresses recommandées par le Lonely ont fait comme plusieurs commerces et fermé leur porte 2 semaines en août et nous avons parfois l'impression de ne côtoyer que des Espagnols, des Français, des Britanniques, des Allemands ou des touristes italiens qui, surprise, se dirigent vers nous pour demander leur route!

Bref, mauvais choix de période de visite, comme pour le Japon?

Non, car la ville nous appartient!!

La chaleur, une compagne

La chaleur? On la défie en s'armant de crème solaire, d'une casquette et de lunettes fumées et elle devient une fidèle compagne plutôt qu'une ennemie à combattre! Un doux silence règne dans les ruelles typiques des secteurs touristiques où marchent pourtant touristes de tous âges, mais sans bousculade, ni charivari. Nos babouches résonnent joyeusement sur le pavé et aucune file d'attente nous empêche de profiter des cafés, trattorias, ristorantes ou gelatias! Nous ajustons nos pas au rythme de la canicule, nous nous laissons couler dans la farniente, une bouteille de vin rouge et le tour est joué!

Bienvenue à Rome pour un plongeon dans l'histoire de la Renaissance et de l'Antiquité!

De ruelles en chef-d'œuvres

Escalier de la Trinité-des-Monts
Un peu abrutis par le décalage horaire et la chaleur samedi, nous nous sommes d'abord échoués, effondrés, écrasés, "effouarés", sur l'escalier de la Trinité-des-Monts, reliant la colline du Poncio à la Piazza di Spagna, située tout près de notre hôtel. La via de la Trinité-des-Monts nous offre de splendides points de vue sur la cité et le parc de la Villa Borghèse nous accueille pour une petite sieste! Puis, observation citadine à la Piazza del Popolo qui, comme plusieurs des places publiques de Rome, compte une obélisque -souvent dérobée à l'Égypte par un quelconque empereur!-, et des fontaines de différentes envergures, puis première nuit de sommeil bien méritée après une projection de Iron Man 2 entre minuit et 2 heures du matin dans notre vol Montréal/Rome!

Jour 2, à la découverte de notre quartier, celui des collines de l'Esquilino et du Quirinale! Car si Rome est la ville des chats errants, elle est aussi celle des faux-plats et des montées, sur l'une de ses 7 collines principales, puis des descentes qui serpentent.

Palais présidentiel, imposante fontaine de Trevi mettant en scène le dieu Neptune et ses tritons, un cheval docile, l'autre sauvage, à l'image des humeurs de la mer, fontaine tout en hauteur qui nous impressionne longuement! Basilique Sainte-Marie-Majeure, Basilique Saint-Pierre-aux-Liens, église di Santa Prassede: coupoles, tombeaux, reliques, la simplicité et le dépouillement du courant baroque dans des lieux sacrés qui imposent par leur taille tout autant que par leur sobriété!

Des lions aux avions

Colisée
Le clou de la journée? Un panini englouti face... au Colisée sous le soleil baissant lentement. Quel impressionnant chef-d'œuvre architectural fixé dans le temps depuis 80 après Jésus-Christ, qui donna asile jusqu'à 50 000 spectateurs venus voir s'entretuer bêtes et gladiateurs! Le contempler en si bon état, observer qu'on le longe en voiture, qu'on le survole en avion et qu'on le visite encore à de quoi impressionner, voire émouvoir.

Nous n'y pénétrons pas encore, nous contentant de le photographier et de revenir l'observer la nuit venue. Éclairés comme la fontaine de Trevi, il n'a pas le panache des édifices mis en lumière à Québec, où la Commission de la capitale nationale leur donne une seconde vie la nuit venue, mais compte sur la mémoire de 2 millénaires pour l'éclairer!

S'ouvrir sur le grandiose

Rome est faite de ces rues et ruelles qui s'ouvrent toujours sur le grandiose : places plus solennelles qu'à Séville, où elles sont couvertes par les tables des cafés, ronds-points dominés par une obélisque pointant le ciel ou une fontaine dans laquelle les dieux font la fête, petites enseignes et marques de prestige, et d'œuvres prenantes des artistes rivaux de la Renaissance, Bernin et Borromini, dont 2 magnifiques fontaines observées aujourd'hui sur la rectangulaire Plaza Novana, l'une rendant hommage aux 4 fleuves des continents alors connus, le Gange, le Rio Plata, le Nil et le Danube. Dragon, cheval, serpent s'observent dans une fiesta de personnages sculptés avec majesté, tandis que plus loin dans le centre historique, l'Elefanto de Bernin qui transporte une obélisque attire plutôt le sourire!

La majesté est maîtresse de ce 3e jour, consacré au parcours du centre historique, où le Panthéon dispute au Colisée le titre d'œuvre maîtresse de la Rome antique. En parfaite santé malgré qu'il conserve sa forme actuelle depuis 120 après Jésus-Christ, il possède la plus grande coupole de pierres jamais construite au monde. On apprend en contemplant le puits de lumière qui la perce qu'une telle coupole construite avec le béton d'aujourd'hui se serait effondrée depuis longtemps! Le secret? Des caissons décoratifs, une savante utilisation d'un mortier atypique et l'utilisation de roches volcaniques!

Palais de pierres avec balcon pensé par Michel-Ange, omniprésent aussi dans la décoration des lieux de culte, avec notamment le tombeau du pape Jules II, églises baroques à la décoration chargée mais combien lumineuse, fresques, vitraux, rosaces, tableaux et sculptures en multitude pour impressionner des fidèles tentés par le protestantisme, encore des fontaines et bien de jolies façades à se mettre sous les yeux dans un centre historique visité, comme ce que nous avons vu de la ville depuis notre arrivée, par des touristes griffés, chics, aux espadrilles urbaines Adidas, Nike et Puma pour messieurs, aux savantes sandales épousant la cheville pour madame, dans un look savamment étudié composé de t-shirt marqués, de robes à froufrous et de canotiers achetés dans une boutique de souvenirs pour se protéger du soleil!

Café mousseux et gelato

À Rome, on fait comme... oui vous le devinez!

Cappucino ou café machiatto et cornetto marmeletta ou chiocolatto le matin, panini ou sandwich attrapé dans l'un des stands de boissons fraîches ou de restauration rapide qui guette les touristes autour des principaux sites au déjeuner, pasta, pizza e insalata le soir! Et une gelato -on connaît les noms italiens des saveurs, merci Tutto Gelato de Québec- et encore un cappucino, surtout quand on tombe sur le meilleur café de Rome, dixit le Lonely, en la personne du Sant'Eustachio! On déguste la boisson délicieusement mousseuse et légèrement relevée de sucre debout au comptoir, comme les locaux, car on épargne le service au table qui fait monter la note!

On se nourrit de ce régime méditerranéen entre 2 via, corso, piazza ou largo, qui, à l'image des ruelles entortillées de l'andalouse Séville, s'ornent de façades saumon, pêche, rouille, safran, rose antique, bleu poudre, jaune citron, moutarde et mauve. Marquées pour certaines par les grafitis, mais moins qu'à Barcelone, elles n'en sont pas moins extrêmement agréables à emprunter, entre 2 voies plus importantes, et font nos journées comme ce lundi au coeur du centre historique de Rome.

Dans un décor de cinéma?

J'ai l'impression de baigner dans une ville décor d'une autre époque, car on cherche en vain la Rome contemporaine et les gens qui l'animent. Et même si on boit de la Heineken, on le fait dans un cadre un peu romantique, sous la lumière tamisée du soleil d'été, ralenti par les pastels des façades comme par la chaleur, mais aussi par ce je ne sais quoi qui nous fait sentir dans un monde où la vitesse ne compte pas...

Piazza del Popollo
Même si la mondialisation nous rattrape -les guitaristes animant les sites touristiques chantent de vieilles chansons britanniques ou américaines, Beatles ou autres artistes, les radios des bars, cafés, restaurants, commerces, ne jouent pas de la musique italienne, mais Lady Gaga, Kate Perry, Eminem et, étonnants, de vieux succès anglos des années 90, genre No more I love you d'Annie Lennox ou Vision of Love de Mariah Carrey-, même si des oeuvres remarquables baignent parfois dans ce que le tourisme a de plus kitchs -caricatures, aquarelles un peu cheaps représentant la Rome des voyages organisés, vendeurs ambulants, musiciens amplifiés, artistes immobiles déguisés en Statue de la Liberté ou faux légionnaire quêtant de l'argent en échange de photos-, on se laisse doucement transporter dans la chaude cité qui nous offre une vitrine étonnamment bien conservée d'époques qu'on ne connaît pas assez.

dimanche 15 août 2010

De la fragilité des centres-villes: l'exemple de Rimouski

Le chroniqueur de La Presse, Pierre Foglia, déplorait hier matin sur Cyberpresse la fermeture d'une des dernières librairies indépendantes de Rimouski, la Librairie Blais. Dans un papier intitulé « Costco », celui qui n'hésite pas à confronter les idées reçues dénonce ceux qui s'étonnent d'une telle fermeture tout en se rendant acheter leur livre dans une grande surface.

Fermer avant de « devenir folles »


Dans « Costco », Foglia rappelle l'histoire de la Librairie Blais, associée à celle de l'imprimerie fondée au même endroit, sur la rue de la Cathédrale. Il s'intéresse à ses libraires, dont Mme Hélène Chassé, qui a déserté la capitale bas-laurentienne pour Montréal où elle a peut-être déniché une clientèle plus fiable.

Quant aux 3 propriétaires actuelles, écrit le chroniqueur, elles « n'en pouvaient plus ».

Costco, mais aussi Amazon, Archambault, le iPad qui s'en vient... Elles mettent la clé sous la porte ce soir avant de devenir folles - peut-être même un peu après.
Foglia termine en relatant la venue expresse à Rimouski du fils du fondateur de la Librairie, résidant maintenant dans la région de Montréal, pour acheter le dernier livre de l'établissement. Gilles Blais y a vu  son père Roméo conseiller des clients... sans même avoir jamais lu un livre de sa vie!!

Des rabais, mais à quel prix?

On paie Millénium moins cher chez Costco ou chez Wallmart, mais est-ce qu'on s'y procure un exemplaire d'Un ange cornu avec des ailes de tôle de Michel Tremblay ou l'excellent roman Nikolski de l'auteur pistolois Nicolas Dickner? Je me suis déjà présenté à la Librairie Pantoute sur la rue St-Jean, dans le Vieux-Québec, avec en tête l'idée d'offrir à un ami séjournant au Brésil un roman traitant du pays de Lula ou écrit par un auteur de cette contrée. Croyez-vous qu'un associé du Club Price  m'aurait déniché Rouge Brésil de Jean-Christophe Ruffin entre 2 exemplaires d'une édition des aventures d'Harry Potter?

Telle est la menace qui plane sur l'industrie du livre: une fois que les librairies indépendantes auront été avalées par des grandes surfaces sans âme, nous seront condamnés à nous y rendre pour acheter nos livres entre 2 allées de papier hygiénique. On nous y servira uniquement des livres rentables, entendre ici des best-sellers pas toujours de qualité, au détriment d'une multitude d'œuvres souvent plus digestes et passionnantes. Fini les découvertes réalisées grâce aux conseils de libraires érudits ou passionnés.

Une fermeture symbole de fragilité?

Mais revenons à Rimouski, ma ville natale qui, avaisi-je l'impression, a réussi à préserver son centre-ville. On côtoie sur la rue Saint-Germain, tant à l'est qu'à l'ouest de la rue de la Cathédrale, des commerces exclusifs aux enseignes retapées et aux produits alléchants:
  • la Brûlerie d'ici et son café frais moulu
  • son voisin, le bar Le Barista, qui partage avec le Café Saint-Louis une des plus belles terrasses en ville
  • la librairie L'Alphabet et sa vaste sélection de jeux de société, de jouets pour enfants et de publications du Québec
  • la boutique de jouets Roudoudou
  • de petits bars sympathiques comme Le Rhinocéros et le Saint-Barnabé
  • la microbrasserie Le bien et le malt
Et s'y on déborde un peu sur la rue de la Cathédrale
  • la crêperie Le Crêpe-chignon
  • la boulangerie Les baguettes en l'air
  • le bistrot Chez Saint-Pierre, notamment,
s'ajoutent à L'Ardoise, le restaurant chéri des Rimouskois qui aiment se payer un bon repas, pour offrir des expériences gourmandes dans des décors accueillants. Nouvelle venue au centre-ville, la maison de thé Bonté divine étend l'offre à cette boisson qu'on déguste de mille façons ces mois-ci.

Lutter contre la Cité des achats

Un centre-ville en santé, donc, sur lequel règnent la salle de spectacle Desjardins-Télus toute vitrée, un musée d'art contemporain aménagé à même un ancien couvent et une cathédrale qu'on a vidé de son patrimoine, mais qui triomphe tout de même dans le ciel rimouskois aux côtés d'un presbytère aux lignes élégantes. Les commerces du centre-ville, les Halles Saint-Germain au premier chef, refuge de desserts, de bonbons, de fromages, de saucisses exquises, de poissons, de bons pains et du Café du même nom, semblent prospérer et attirer une clientèle qui fait les courses avant de déguster un chocolat chaud royal ou un allongé.

La lutte contre la Cité des achats, qui a entraîné vers un obscur parc industriel du sud-est de la ville plusieurs adresses de grandes chaînes -de Saint-Hubert à Desjardins en passant par Tim Horton, Score, Super C, Clément, etc.- aux côtés du Wallmart est-elle gagné pour autant? La fermeture de la Librairie Blais me rappelle tristement que non, ce matin.

Faire ses courses le long de l'autoroute

Cette disparition se conjugue à la drôle d'idée d'une société phare de l'art de vivre des Québécois, la SAQ. Celle-ci vient de fermer ses 2 succursales au centre-ville de Rimouski pour aller elle aussi se faire voir à l'est, à proximité de l'autoroute 20, coupable d'avoir bouleversé de façon majeure l'urbanisme rimouskois. Résumons: on peut se procurer sur la paisible rue Saint-Germain, en vagabondant à pied d'une adresse à l'autre, du café équitable, du chocolat noir, des fruits frais, du poisson fraîchement pêché, des saucisses aux saveurs variées, des fromages gourmands... mais pas de vin pour accompagner cette joyeuse boustifaille.

J'ose espérer que la dynamique Association des marchands de Rimouski convaincra la SAQ d'installer une succursale sur la rue Saint-Germain, pour que cette rue bordée par le fleuve redevienne le lieu des courses épicuriennes de la ville. Elle offrira ainsi aux Rimouskois tous les plaisirs de la bonne bouffe sans qu'ils n'aient à se rendre dans l'un des secteurs les plus laids de la ville, enrichir des adresses ayant leur siège social à l'extérieur de la ville ou aux États-Unis.

Sauver le centre-ville d'affaires et culturel

Quant à la vitalité culturelle de la rue principale rimouskoise et des institutions du spectacle qui l'entourent, elle demeure elle aussi fragile. Cinéma 4, le cinéma indépendant de Rimouski qui survit de peine et de misère, doit composer avec une décision stupide du cinéma commercial Le Lido d'offrir lui aussi des films de répertoire... avant son « concurrent ». Des cinéphiles convaincus tentent depuis des années d'offrir du cinéma diversifié aux Rimouskois pour des pinottes: était-il nécessaire qu'un cinéma commercial qui fait ses frais aille jouer dans ses plate-bandes? Rimouskois, cessez, comme le suggérait mon amie NL, d'aller voir du cinéma d'auteur au Lido et encouragez Cinéma 4!

En conclusion?

Dimanche pluvieux à Rimouski: payez-vous un bon roman à L'Aphabet, entreprenez-en la lecture réchauffé par un allongé à La Brûlerie, souper d'une crêpe du jour au Crêpe-Chignon puis laissez-vous emporter par le plus récent Xavier Dolan à la salle Georges-Beaulieu, hôte de Cinéma 4. Une journée militante pour redire votre amour à un centre-ville qu'on ne souhaite pas canibaliser par des chaînes allergiques à l'économie locale.

dimanche 8 août 2010

Origine : mission impossible au coeur d'une matrice réinventée

Depuis sa sortie attendue, Inception (Origine) épate tant par sa signature visuelle que par la complexité et l'intelligence de son scénario.

Superproduction brillante et audacieuse d'un réalisateur qui l'est tout autant, Christopher Nolan, ce film à voir en français pour n'en rien manquer mérite tous les compliments qu'on lui a adressés. L'homme derrière les récits magistraux de Memento et The Prestige, le sauveur de la franchise Batman, nous entraîne encore une fois dans une aventure haletante filmée avec brio. Sa destination cette fois: un univers aussi romantique que sans pitié, le subconscient humain.

L'extracteur de secrets

Cobb (Leonard DiCaprio, qui a le don de choisir ses rôles depuis quelques années) est un homme blessé. Privé de la femme qu'il aime, dans l'impossibilité -on comprendra pourquoi plus tard- de revoir ses enfants, cet architecte du subconscient écume le monde pour vendre ses talents à des multinationales peu commodes. Celles-ci l'emploient pour pratiquer de l'espionnage industriel à l'aide d'une arme peu banale, le rêve. De l'extraction d'idées au royaume des pensées les plus intimes de l'homme, quoi!

Au terme d'une mission qui tourne mal, survient une occasion inespérée pour « l'extracteur », celle de rentrer à la maison sans encombre pour retrouver les siens. Seule condition: réaliser la mission inédite que lui confie un puissant magnat de l'énergie: pratiquer ce qu'on appelle une inception, l'insertion plutôt que l'extraction d'une idée, dans l'esprit cette fois de l'héritier d'une compagnie concurrente.

Une équipe de surdoués

Commence alors pour Cobb la tâche délicate de recruter les membres de son équipe, car pénétrer l'inconscient exige la mise en commun de talents en tout genre!
  • Un faussaire plutôt comédien pour créer le scénario qui conduira l'héritier à renoncer à son empire
  • Une architecte pour concevoir le décor des rêves et le labyrinthe pour en sortir
  • Un chimiste pour concocter le sédatif qui endormira suffisamment tous les participants à la mission
  • Un « endormeur » spécialiste de l'apesanteur à ses heures
tous un peu agent secrets doués pour l'improvisasion et la persuasion!

Voilà pour le côté Mission: Impossible du film, captivants préparatifs qui happent le spectateur dès leurs premières scènes. Du rythme, du rythme et encore du rythme, et encore plus de rebondissements lorsque l'équipe entreprend d'exécuter le plan imaginé dans les moindres détails pour convaincre l'héritier de demanteler l'empire de son père en le faisant naviguer au coeur de 3 niveaux de rêve. Ce n'est pas tout de rêver, il faut aussi se réveiller, et c'est dans ce simple défi que repose le succès du plan...

Invraisemblances sans conséquence...

Avertissement: Inception est truffé d'invraisemblances. Quoique imaginatif et soigneusement ficelé, le scénario ne tient pas la route à plusieurs endroits... quand on s'y attarde et comporte plusieurs questions sans réponse. Comment tous les rêveurs en viennent-ils à plonger dans un seul univers, celui du dormeur qu'on veut piéger, par? On passe rapidement sur plusieurs détails, quoique certains se révèlent d'une importance primordiale... Mais on s'amuse, on frissonne, on s'interroge, on passe un excellent moment, quoi, en compagnie de cette équipe du tonnerre du subconscient si on accepte les prémisses de départ.

Origine n'est peut-être pas un film d'acteurs, mais il s'appuie néanmoins sur une solide équipe de comédiens, à commencer par Leonard di Caprio, à la fois imposant et vulnérable, et Marion Cotillard (son epouse), jouant une femme dont la vie a à la fois été magnifiée et ruinée par son passage conscient dans l'univers du rêve. Tourné dans 6 pays, Inception épate évidemment par le caractère grandiose de ses images -la ville de Paris roulée en tartine par la seule volonté d'une architecte surdouée!-, ses artifices visuels, la beauté de sa photographie.

Pas si complexe qu'on le dit, Inception ne renie pas ses influences. En plus d'évoquer Mission: impossible, il présente une évidente parenté avec The Matrix par son questionnement sur la réalite du monde qui nous entoure et comprend des scènes de poursuite hivernales inspirées de séquences de films de James Bond.

Assurément en nomination aux Oscars du meilleur film,  Inception se range dans la catégorie des films à voir absolument. Un soir où vous êtes en forme, cependant... ou soutenu par 3 espressos!

jeudi 5 août 2010

Bonnes adresses

Nouvelle série de bonnes adresses tant pour mes amis rimouskois que de Québec, et pour celles et ceux qui visitent les 2 plus belles villes de la province!


Déjeuners du pêcheur, de luxe et à la mer

En juillet, mon père et moi avons relevé le défi de l'Assiette du pêcheur au Bistrot du Nipigon de Sainte-Luce-sur-Mer, charmant village à 20 minutes de Rimouski s'étalant paresseusement au bord du Saint-Laurent. Maisons champêtres, auberges et restaurants, promenade le long de la plage, et la terrasse du Nipigon au coeur de cette vie de bord de mer posant presque ses parasols sur le sable de la plage. Quant au nom de l'établissement, il évoque l'épave du sous-marin HMCS Nipigon, coulé au large de Sainte-Luce pour le bonheur des plongeurs.

À expérimenter par une journée de soleil, cette fameuse assiette, comprenant tout le contenu de l'habituelle assiette brunch, en plus de quelques tranches de savoureux saumon fumé. La totale de l'assiette brunch, qui prépare son homme pour une rude journée de vélo!

Vous passez quelques jours dans la région de Rimouski? Nouveau déjeuner au restaurant, cette fois à celui de la marina, à Rimouski-Est, pour rêver d'aventures et de voyages à une table contemplant avec envie les voiliers amarrés devant elle. J'adore les "bateaux à voile", ça me rappelle toujours la France, et l'expérience de les observer se bonifie au Restaurant-Bar de la Marina d'un déjeuner d'excellente qualité et d'un service extrêmement jovial et courtois.

À Québec, détour par le Clocher penché, dans Saint-Roch, adresse où je ne m'étais pas arrêté depuis 7 bonnes années, le temps d'annoncer une amie que j'avais maintenant un conjoint dans ma vie...! Choix appréciable de déjeuners raffinés, dont un plat avec agneau, servis dans une présentation originale, mais un peu lourds le matin... À recommander pour celles et ceux qui aiment bien manger et qui recherchent l'audace, mais pas aux gourmands qui rêvent de 2 oeufs miroirs bacon.

Décor vintage, portions pas de notre époque

5 à 7 à La Cuisine jeudi soir dernier où je me sens immédiatement à l'aise dans un décor vintage années 70 soigneusement reconstitué! Couleurs d'orange, de vert, de brun, de jaune éclantant, chaises soigneusement désassorties récupérées dans je ne sais quelle boutique d'antiquités ou au Village des valeurs évoquant le sous-sol d'église ou la salle à manger de grand-maman, accessoires tout aussi typiques d'une époque. On y sert des pintes à 4,25$ d'une microbrasserie de Joliette, L'Alchimiste, bière délicieuse, mais pourquoi ne pas privilégier une micro de Québec, dont ma préférée, Archibald. du Lac-Beauport?

Lieu original pour le 5 à 7 mais à éviter pour celles et ceux qui ont de l'appétit: les portions de pâté chinois, de pâtes et de pizza servies nous ont vraiment laissé sur notre faim... Quant à la salade de juliennes de carottes et de navets qui accompagne les plats, elle est plutôt terne dans l'assiette et plutôt acide en fait... Imaginez, j'ai soupé 2 fois ce soir-là, vers 19h30 et vers 22h30! Ça ne m'était pas arrivé depuis les minuscules portions du Japon...

Souvenir de France

J'aime de plus en plus les salades et je rêve de tomber sur un restaurant qui en fait sa spécialité: salades repas avec une variété d'ingrédients misant sur la couleur et la diversité. Quoiqu'il en soit, en attendant, pour une délicieuse et complète salade niçoise, présentez-vous au Café Au temps perdu, classique étudiant et bohême chic de la rue Myrand, pourvu d'une terrasse où il fait bon flâner. La classique salade française y est appétissante... comme le bagel au saumon fumé et bien des plats qui y sont servis!