Notre-Dame-de-Paris |
Alors que nous rentrons vers l'automne, à bord de l'avion qui nous conduit à Dorval, je me souviens avec nostalgie du soleil parisien, des températures douces, mais jamais éprouvantes de la capitale française, et de cette pause prise dans notre voyage fébrile pour élever le flânage au rang d'art de vivre!
Des classiques aux découvertes
Nous avions convenu, pour notre étape parisienne, de ne visiter que des sites, monuments ou lieux qui nous étaient inconnus. Promesse pas tout à fait tenue, puisque nous n'avons pu nous empêcher de renouer avec certains classiques:
- la visite de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris, ses lumineux vitraux, ses rosaces et ses gargouilles qu'on entend presque grogner lorsqu'on longe le lieu de culte
- la ballade incontournable la nuit venue sur les Champs-Élysées depuis l'Arc de Triomphe jusqu'à la Place de la Concorde, pour savourer le sens de la perspective des Français et leur talent dans l'aménagement des grands boulevards. J'avais oublié que la place de la Concorde était si vaste...
- la tour Eiffel, que nous avons pour la première fois abordée le soir, pour réaliser que Paris, outre ses principaux monuments, demeure plutôt sombre quand la nuit tombe, ses grattes-ciels étant cantonnés au secteur de La Défense et les éclairages des ponts enjambant la Seine se révélant plutôt tamisés.
Vue de Paris, Centre Georges-Pompidou |
À ces classiques nous avons ajouté une visite -ou à peine plus!- par jour:
- visite guidée à pied du quartier Le Marais où nous avons -choix plus que judicieux- posé nos pénates dans un studio minuscule, avec notre bien nommé guide M. Souliers, savant dosage de fausse modestie, d'humour pince sans rire et d'élitisme à la sauce « mais bien sûr, vous savez ça... » et « tout le monde pense que le Louvre a été un palais royal, mais ce n'est PAS un palais royal! Bon, bien sûr, Louis XIII y a vécu et Louis IV un peu, mais... »
- Centre d'art Georges-Pompidou le samedi, pour nous laisser décontenancer ou séduire par les peintures et sculpteurs modernes français et d'ailleurs
- Promenade plantée et Canal Saint-Martin le dimanche, sous les arbres et au bord de l'eau
- Et mémorable visite de l'Assemblée nationale française, fermée au public, mais dont mes collègues québécois ont réussi à m'ouvrir les portes le lundi.
Mais, je dois l'avouer, mes séances de flânage m'ont apporté presqu'autant de satisfaction que ces nobles activités.
Regarder le monde passer
Canal Saint-Martin |
Le vendredi, par exemple, nous sortons petit déjeuner à 11h : malheur à nous, puisqu'il est trop tard pour le premier repas du jour, mais trop tôt pour le déjeuner du midi. Qu'à cela ne tienne, nous nous échouons sur la terrasse du café Le Progrès, dont les chaises, comme la plupart des terrasses parisiennes, sont orientées vers la rue animée, et enfilons un espresso, puis 2! Et quand midi sonne, nous sommes les premiers à nous jeter sur le menu, débutant par une bière, puis par notre repas.
Sous le soleil, les bourgeois bohèmes du Marais défilent élégamment, vêtus de leur complet-cravate ou de leurs atours de travail ou fashionistas l'air en vacances comme nous, mais à la tenue savamment étudiée, de la ganse de la sandale à la boucle de la ceinture! À nos côtés, comme d'autres de leurs compatriotes sur toutes les terrasses ou dans tous les restaurants où nous nous poserons, 2 Françaises semblent tenir la conversion de leur vie, s'écoutant à peine mettre leur tripes sur la table et décomposer avec intensité la vie décevante, difficile, faite de contraintes qu'elles semblent mener.
Quel bonheur, nous comprenons ici ce que nos voisins racontent! Nous qui sommes d'une humeur légère pouvons capter leurs confidences venant de leur fond profond, tandis que bourdonnent les moteurs des scooters et que des Renaud Clio tentent de se stationner, que le garçon nous lance un « C'est parti » et que personne, au Progrès comme ailleurs, ne s'attarde à notre accent « canadien ».
C'est la première fois que je vais à Paris et qu'on m'en parle si peu, voir « si pas », d'ailleurs, exception faite d'un designer de Hong Kong sur la coke ou je ne sais quoi rencontré dans un bar. Il nous a parlé en anglais parce qu'incapable de comprendre notre français « so harsh! » et riant dudit français. On l'a rapidement « flushé ».
La comédie humaine
Place Igor-Stravinski |
Séance de flânage toute aussi agréable le samedi après-midi au terme de notre déambulation devant les Picasso, Dali, Fernand Léger, Mirò, Francis Bacon et autres œuvres spectaculaires des peintres et sculpteurs surréalistes, cubistes, fauvistes découverts ou redécouverts entre les murs de l'inédit Centre d'art Georges-Pompidou. J'ai adoré l'édifice vitré offrant de belles vues sur Paris, sa structure exposant sans gêne tuyaux de ventilation, d'eau et autres de différentes couleurs sur sa façade et sa fontaine animant de façon ludique la place Igor-Stravinsky et décorée de figures colorées d'animaux et de machines industrielles sans queue ni tête. Comme le disait avec humour mon ami JSP, « j'ai vu des affaires là... ».
Donc, flânage rue Saint-Martin, à proximité du Centre, toujours dans le Marais, devant un pain au chocolat et aux amandes et un capuccino. Alors que se termine une manifestation de protestation contre la politique du gouvernement Sarkozy à l'égard des Roms qu'il retourne sans flafla en Roumanie, je vois passer devant moi la faune la plus variée que j'aie jamais eu la chance d'observer!
Français de souche et d'origine étrangère, Africains, Maghrébins, Asiatiques, Indo-Pakistanais, jeunes punks ou hipsters, retraités bien mis ou hippies, touristes aux sacs bananes-bas blancs-espadrilles impeccables-leggins, bobos chics, rappeurs, rockeurs, granos... Toute la comédie humaine semble s'être donnée rendez-vous sur cette rue de boutiques de souvenirs kitchs, d'affiches de films des années 1920 à aujourd'hui et de gadgets tantôt ingénieux -porte-monnaie de plastique permettant de se baigner sans souci au Village des sports avec ses huards-, tantôt franchement amusants: toutous en forme de barbapapas, par exemple!
Ce jour-là. nous n'en finissons plus de flâner, passant de boutique en boutique, nous étendant sur le square pas trop loin bordant la Tour Saint-Jacques, contemplant la vie, tout simplement, car le Marais regorge d'animation et beaucoup de jeunes familles semblent y loger. Le soir venu, les cafés, les restos et les bars de la rue Saint-Antoine et des rues telles celles de la Vieille Temple s'emplissent systématiquement!
De la Place des Vosges au canal Saint-Martin
Place des Vosges |
Flânage encore le dimanche, alors que nous renonçons à une visite de la Conciergerie et de la Sainte-Chapelle -et oui, GB et NT, nous avons fait ça-, pour nous étendre sur le gazon tout frais de la Place des Vosges à 2 pas de l'une de ses fontaines. Cette place royale aménagée pour Henri IV, mais inaugurée par Louis XIII, première place royale de Paris et cœur de la vie du Marais est tout simplement délicieuse! J'y écris mon journal et 2 ou 3 cartes postales.
Et flânage encore le long du canal Saint-Martin, belle découverte au terme de la Promenade plantée qui relie La Bastille à sa première écluse, dans lequel nous ne lançons pas de petits cailloux comme Amélie Poulain, mais que nous remontons comme bien des Parisiens assis sur ses bords, qui participent à un rallye pour l'apprivoiser ou qui se rendent au cinéma situé au bord du Bassin de la Villette dans lequel se termine le Canal. Nous flânons encore dans la librairie et boutique de DVD adjacente au cinéma et encore et encore sur la terrasse surplombant le bassin sur laquelle nous nous offrons une bonne pinte de bière!
Coup de coeur pour Le Marais
J'ai vraiment eu un coup de cœur pour le Marais, notre quartier d'adoption, que l'étroitesse de notre studio nous a incités davantage à visiter, quoiqu'il faisait un temps magnifique. Vivifiant comme quartier, avec sa faune jeune et dynamique, ses bonnes adresses -même si celles recommandées par la plus parisienne des Québécoises, mon amie SI, étaient fermées pour les vacances...-, ses spécialités juives et sa vie débordante. J'ai rarement éprouvé autant de plaisir à « regarder le monde » tout en me gavant de capuccino, définitivement la boisson du voyage dans toutes ses déclinaisons!
Même en Angleterre? Oui, même au royaume du thé, my dear!
Anecdote en terminant: j'ai commis mon seul geste violent du voyage à Paris. Après m'être étalé par terre sur le plancher de notre studio, glissant sur le plancher mouillé, j'ai fait tomber dans un excès de rage le seul rideau isolant la salle du bain de la pièce principale. Ben quoi! J'aurais pu me casser quelque chose!!